L’esprit du Chocolat de Bayonne

tasse de chocolat chaudÀ l’origine réservé aux élites, au fil du temps la consommation du chocolat se démocratise. C’est donc naturellement par goût et pour se distinguer que la “bonne société” et les consommateurs avertis recherchent le chocolat de qualité supérieur, dés le 18éme.

« Maintenant que boire du chocolat n’était plus suffisant pour se distinguer, il s’agissait d’exprimer son aisance en prenant du très bon chocolat à Bayonne, comme dans les autres villes du Pays Basque, les élites ne renoncèrent pas à la consommation de chocolat, tandis que celle-ci se répandait dans de larges couches de la société. Au cours des collations servies aux jurats bayonnais dans le courant de l’année 1783, de prestigieux chocolats à une ou double vanille figuraient en bonne place auprès du café. Un chocolat confectionné sans addition de cette précieuse épice apparaissait également en ces occasions, mais sa simplicité était hautement revendiquée, car il s’agissait d’un chocolat de santé. »

 

La réputation du chocolat de Bayonne devint excellente à Paris dans le courant du 18éme siècle. Cette reconnaissance passe par une rencontre de l’élite parisienne avec celui-ci, dans laquelle les réseaux personnels jouent un rôle important. Les Bayonnais conduits dans la première ville de France par leurs affaires font connaître sous son meilleur jour le chocolat de leur chère cité.

Tableau représentant des nobles dégustant du chocolatAu milieu des années 1770, le représentant d’une autre ville, alors qu’il souhaite recevoir un chocolat de qualité, ne manque pas de s’adresser au délégué personnel, qui lui-même se charge d’adresser la commande au pays : « Un de mes confrères m’a prié de lui faire fabriquer à Bayonne vingt livres de chocolat dont dix à la vanille et dix de santé… ».

 

Fabrication de bonbons de chocolat de BayonneUne fois connu, le chocolat de Bayonne est donc recherché par une clientèle fortunée qui peut accéder à une large gamme de bons chocolats. Le “phénomène” prend de l’ampleur et sa renommée faite à la capitale, le chocolat de Bayonne devint une denrée goûtée dans l’ensemble du royaume par les amateurs raffinés.

 

Bayonne est positionnée sur le marché de la qualité, seuls ses chocolats les plus fins sont exportés. Par conséquent, son nom devint celui d’un site remarquable de l’Europe chocolatière.

 

L’hôtel des Américains fabrique à Paris un chocolat “à la façon de Bayonne” que Grimod de la Reynière juge d’une excellente qualité (almanach des gourmands, Paris, Maradan, 1810).

 

Portrait d'Alexandre DumasDans son Grand dictionnaire de cuisine, Alexandre Dumas reproduit l’une des formules qui permet d’obtenir ce chocolat “d’inspiration bayonnaise”.

 

 

 

Au tout début du 19éme siècle, alors que nait la gastronomie moderne, le chocolat de Bayonne jouit d’une fort bonne réputation, qui lui vaut notamment d’apparaître aux côtés de nombreux autres délices provinciaux sur la première carte gastronomique de France, celle qui est insérée dans le traité gourmand publié en 1809 par Charles Louis Cadet de Gassicourt (Cours gastronomique ou les dîners de Manant-Ville, Paris, Capelle et Renand, 1809).

 

Citations des médailles de la Maison FagaldeLa maison Fagalde figure dès les années 1850 parmi les champions de la chocolaterie basque modernisée. Les produits qui sortent de son usine de Cambo s’inscrivent dans la prestigieuse lignée bayonnaise et s’en revendiquent parfois même fièrement. La localisation de son dépôt central à Bayonne, sous les arceaux de la rue Port-Neuf, enracine encore un peu plus cette chocolaterie dans la tradition bayonnaise. Fagalde est la maison vingt-cinq fois récompensée dans des expositions nationales et étrangères, un fournisseur breveté de Napoléon III et d’Eugénie.

 

 

En 1933, Curnonsky et Austin de Croze inscrivent les « chocolats (bonbons), chocolats fourrés et chocolats de Bayonne» dans leur Trésor gastronomique de France (Répertoire complet des spécialités gourmandes des trente-deux provinces françaises, Paris, Delagrave, 1933).

 

Couverture du guide des touristes gastronomesEn 1954, le Guide des touristes gastronomes conseille à ses lecteurs de découvrir, en passant, les chocolats fourrés de Bayonne.

 

En 1967 Jean Arnaboldi (Guide des spécialités gastronomiques de France, Paris, Albin Michel, 1967) mentionne le chocolat et les bonbons au chocolat de Bayonne.

 

Aujourd’hui, La présence du « Chocolat de Bayonne » dans le volume de l’inventaire du patrimoine culinaire de la France consacré à l’Aquitaine montre que celui-ci est un produit reconnu dans le petit monde des gastronomes.

 

Salon de dégustation de chocolats de Bayonne sous les Arcades de la rue Port Neuf à BayonneLes artisans Bayonnais cultivent l’art de la chocolaterie en s’inspirant de cette riche histoire. Tout en gardant les caractéristiques propres du chocolat de Bayonne: noir, puissant, intense, amer, peu sucré, ils réussissent à faire preuve d’une grande diversité de goûts, saveurs, textures, formes typiques à chaque maison, et c’est ce qui fait aussi l’esprit et la richesse du chocolat de Bayonne.

 

Portrait de Perico LegasseSelon Périco Légasse (Ambassadeur du chocolat de Bayonne):
« un produit doit avoir la gueule de là où il est né et les tripes de celui qui l’a fait ».
Cette citation, pleine de “caractère”, peut sans aucun doute s’appliquer à la chocolaterie Bayonnaise.

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